C’est un curieux bâtiment que l’on distingue surplombant les toits de Liège. Le Cirque des Variétés, appelé aussi Cirque d’Hiver, a vécu une histoire pas toujours drôle.

Imaginez donc, à hauteur des toits de Liège, une piste de cirque, offrant au public spectacle équestre, clowns, musiciens, jongleurs et voltigeurs…

Ce projet fou a vu le jour au milieu du XIXe siècle. En 1853, la Société du Manège de Liège décide de construire, là, au coin de la rue Sur la Fontaine et de la rue Thier de la Fontaine, une école d’équitation : habitation, manège, écuries, une remise et un atelier de maréchal-ferrant. Mais une vingtaine d’années plus tard, la Société du Manège est dissoute, faute de succès.

Le bâtiment est alors racheté par un négociant en bois qui y installe une piste de courses de patins à roulettes. Une expérience qui durera deux saisons.

© Mons-wikimedia.org

Clowns, jongleurs et voltigeurs

Quelque peu utilisé à nouveau comme cercle équestre et comme lieu de représentation pour les cirques de passages, le Cirque d’Hiver va connaitre, fin du XIXe siècle, un essor flamboyant.

En 1892, le bâtiment est aménagé en école de cirque. C’est l’architecte François Petit qui mènera les travaux. On dit qu’il travailla également à une époque avec Gustave Eiffel. D’où cette légende urbaine qui circule dans le milieu de l’urbex et qui attribue la paternité du Cirque d’Hiver à l’ingénieur français. Le Cirque est alors réaffecté à la nouvelle Société du Manège sur la Fontaine.

La nouvelle salle propose une piste circulaire parfaite et des tribunes pouvant accueillir jusqu’à 3.500 spectateurs. Les écuries se trouvent au rez-de-chaussée et le bâtiment s’élève sur 4 niveaux, coiffés d’une charpente en bois, acier et verre. La salle est éclairée par un lanterneau circulaire de verre et d’acier qui surplombe la charpente.

 

1890. Antonio Wallenda, célèbre dresseur de chiens, devient le directeur du nouveau « Cirque des Variétés ». Il optera pour une gestion « à l’américaine » des lieux : enseigne lumineuse sur la façade, jardin d’hiver orné de miroirs et d’une multitude d’ampoules électriques.
Il y organise des spectacles variés et dès 1901, les mois d’octobre, il y accueille des cirques de renommée internationale : le cirque Beketow (Russie), le cirque Rancy, le cirque Angelo… Un orchestre professionnel est également engagé.

Sur cette archive de 1908 (ci-dessous), on peut voir un dessin de la revue satirique « Tatène veuve Tchanchet » se moquant gentiment du patron des Variétés. En page 4, une publicité annonce les prochains spectacles.

Malheureusement, l’engouement du public faiblit et le Cirque des Variétés sera transformé en garage, à l’entre-deux-guerres.

La décoration fastueuse des lieux est démontée, le bâtiment en lui-même est complètement transformé : quatre énormes dalles de béton viennent constituer autant d’étages. Au centre de chaque dalle, une plaque tournante en bois permet aux véhicules, montés par deux ascenseurs Jaspar, d’accéder à leur emplacement. En 1936, le Cirque devient le garage Majestic.

En 1967, Georges Rem écrivait dans « Si Liège m’était conté » : « Qu’est-il devenu ce magnifique manège de Monsieur Wallenda, où j’ai vu Baguessen pulvériser ses assiettes et l’homme-singe grimper aux colonnes ? Un garage, naturellement ! » (Archives Bulletin de l’Association royale d’architecture, 1992).

Fin des années 80, la toiture est classée, grâce à l’opiniâtreté de membres de l’ASBL Ville & Quartier, qui a œuvré à la restauration de ce vestige du passé. Le projet est ambitieux : faire revivre ce lieu de culture avec des spectacles, du théâtre, des concerts. Malheureusement, le projet ne durera que très peu. Le groupe Front242 y tourne le clip de son titre Quite unusual (1986) et le Festival Voix de Femmes y est organisé fin des années 90.

Mais le bâtiment est ensuite lentement et inexorablement délaissé.

Un espoir

Le Cirque des Variétés existe toujours, du moins son dernier étage. Le reste du bâtiment est occupé par une salle de fitness.

Seul ce dernier niveau subsiste, avec ses box, sa dalle en bois tournante et sa superbe charpente d’acier, de verre et de bois. Le patron de cette société de sport qui occupe les lieux a des projets. Il voudrait restaurer le dernier étage et lui redonner sa vocation initiale : celle dédiée aux spectacles et à la culture.

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Date de publication : le samedi 26 mars 2022

Texte, photos et vidéo : Jacques DUCHATEAU sauf archives Mons-wikimedia.org et ULiège.
Développeur : Cédric Dussart