Cent ans de couverture de l’actualité, ce sont des millions de photos. Derrière chacune d’entre-elle, il y a une histoire, petite ou grande. C’est ce que nous vous proposons de découvrir avec les quinze photos sélectionnées ci-dessous. Pour chacune, cliquez sur l’image et vous pourrez lire l’histoire qui s’y rapporte.
18 février 1934. Marc Delforge est le premier journaliste à se rendre à Marche-les-Dames, sur les lieux où a été retrouvé le corps sans vie du roi Albert. « Quand nous sommes arrivés sur place, le corps venait de repartir, le Parquet n’était pas encore là. Il n’y avait presque personne. Nous avons pu grimper dans le bois, nous avons repéré des feuilles maculées de sang, nous avons interrogé les gardes forestiers et les gens qui avaient participé aux recherches. Puis le monde a commencé à affluer, des journalistes venus de partout. Il n’y avait pas de photographe à l’époque à Vers l’Avenir. Nous avons demandé à quelqu’un de prendre des photos. Je suis rentré à Namur et j’ai pondu un papier à toute vitesse. On a téléphoné à des ouvriers pour les rappeler et on a imprimé une édition spéciale, le dimanche après-midi, qu’on a vendue en ville. Il y avait des fautes, c’était un peu bâclé, mais nous étions les premiers avec la nouvelle à Namur. »
Sur cette photo : les lieux de l’accident, quelques heures après la découverte du corps avec, à l’avant-plan, une voiture de la Cour. Apparaissent sur la photo : Louis Huart, bourgmestre de Namur ; Joseph Gillet, secrétaire communal ; Fernand Mathieu, député ; Jean Materne, bourgmestre de Jambes, ainsi que plusieurs journalistes, isolés dans l’encadré : Marc Delforge, Philippe de Thysebaert, Marcel Sevrin.
23 avril 2015. À Auvelais, le doyen, l’abbé Francis Lallemand, a présidé une cérémonie inhabituelle : une bénédiction pour l’enterrement d’un chien, Miss Chiwa, dans son église Saint-Victor. L’évêque de Namur, Mgr Van Cottem, a pourtant exprimé son désaccord à propos de ce rituel insolite. « Il ne s’agit pas d’une messe de funérailles d’un homme ou d’une femme, explique le prêtre. L’enjeu est d’accueillir cette détresse d’un couple de maîtres, perdant un petit animal faisant partie intégrante de sa famille. » Il ajoute : « Le sens qu’on peut donner à cette célébration, c’est cette attention que le Christ avait pour toutes les personnes blessées. »
Février 1929. Depuis le début du mois de février 1929, le froid et ses conséquences sociales, économiques et environnementales font la Une de la Chronique locale et provinciale de Vers l’Avenir. Le comité de la Croix-Rouge se constitue en Comité de secours aux victimes du froid. Il réunit les sociétés et œuvres à but charitable, organise les actions et ouvre une souscription. Les regards se portent aussi sur la Meuse qui, depuis quelques jours déjà, se fige de plus en plus. Du côté de Profondeville, l’épaisseur de la glace est estimée à au moins 15 cm. Pour éviter les risques de débâcle au moment du dégel, le Génie militaire fait sauter la glace. Une opération qui a duré trois jours.
15 juillet 1969. À Dinant, un autocar transportant des touristes hollandais, brise ses freins dans la longue descente de la rue Saint-Jacques.
L’accident a lieu à 13 h 20. Les promeneurs cheminant sur le quai Sasserath voient le car débouler à vive allure, renverser la rambarde et plonger dans le fleuve. Quatre passagers apparaissent à la surface et rejoignent la berge à la nage. Le groupe se rendait en excursion à Bouillon. Une survivante raconte les efforts désespérés du chauffeur pour arrêter son véhicule contre une façade latérale. Elle a eu la vie sauve, dit-elle, parce qu’elle se trouvait près de la porte.
Cet accident, le plus meurtrier, ne sera pas le dernier en cet endroit.
Crédit photo : F. Seha, Dinant
15 août 2012. À Dinant,comme chaque année, la Régate des baignoires attire des milliers de personnes sur les berges de la Meuse. Soudain, un ponton amarré au quai Culot s’enfonce dans le fleuve, sous le poids des spectateurs. L’accident crée un mouvement de panique. Finalement, tout le monde est évacué, il n’y a pas de victime.
Michel Motte, correspondant qui couvre l’événement, se trouve à quelques mètres. Il prend cette photo extraordinaire. Les mouvements des corps, des bras, des jambes de ceux qui apportent leur aide ou qui cherchent leur salut, les visages qui expriment l’angoisse, les regards des spectateurs curieux ou inquiets, se haussant pour mieux voir : tout est parlant. On croirait un tableau de maître, le Radeau de la Méduse de Géricault.
La nuit du 2 au 3 novembre 1980, vers 5 h 10 du matin, une épaisse fumée envahit la salle de jeux du casino de Namur. À l’arrivée des pompiers, un appel d’air se produit ; en moins d’une minute, une grande flamme embrase tout le bâtiment. Plusieurs heures de combat sont vaines : toute l’aile sud du complexe, avec la grande salle de roulette, la salle de baccara, le restaurant, le bar, le bureau, les vestiaires, est réduite en cendres.
Coïncidence ? La reprise de la concession avait été finalisée deux jours avant. L’enquête sur les origines du sinistre n’aboutira pas. Le beau bâtiment, construit en 1911 par l’architecte Hobé, sera rebâti dans un style plus moderne et sans retrouver le charme d’autrefois.
14 juillet 2010. Elle n’a pas duré un quart d’heure, mais elle a alimenté le journal durant des semaines. La tempête du mercredi 14 juillet 2010 est une des catastrophes naturelles les plus marquantes des dernières décennies, dans le Namurois, aux côtés des inondations des années 1990 en vallée mosane. Les vents violents frappent surtout Ciney et ses villages, mais également Hamois, occasionnant plus de 140 millions d’euros de dégâts. Plus de 400 toitures de maisons, fermes ou hangars arrachées et, parmi les édifices touchés à Ciney, l’hôtel de ville, le théâtre, la piscine… L’image qui symbolise le fait divers, dans les cœurs et dans les médias, c’est celle de la collégiale Saint-Nicolas décapitée. Son clocher, effondré à l’intérieur de l’édifice, sera reconstruit seulement sept ans après cette tempête qui, miraculeusement, ne fait que deux blessés.
1er décembre 1987. Terrible brouillard sur le Namurois. À Namêche, un train de voyageurs heurte un convoi de marchandises à l’arrêt. Deux cheminots perdent la vie. À peu près au même moment, sur le viaduc de Beez, deux collisions en chaîne se produisent. Au total, 23 véhicules sont endommagés et il y a deux morts, deux électriciens qui périssent dans leur voiture écrasée entre trois poids lourds. Cette photo impressionnante prise par Benoît Mariage montre un sauveteur tentant de dégager un automobiliste coincé. Il est debout sur la balustrade, à quelques centimètres du vide.
13 août 1928. Sur la plaine de Belgrade,une Grande fête d’aviation est organisée. Le journaliste Jules Tellier raconte son baptême de l’air: « Si vous n’avez jamais tâté de l’avion, n’attendez plus. On est installé au fond de son box le plus commodément. Seule la tête, bien à l’air, dépasse de la carlingue. L’aéroplane roule très vite, fait un bon de sauterelle, puis quitte le sol. Les gens sont tout petits, sous vous, et on se trouve tout à coup certainement à 100 mètres en l’air. Eh ! mais le vent souffle ! Je n’aurais jamais cru mes narines pouvoir se dilater à ce point ! La chose légère que nous habitons plane presque sur place (ce n’est qu’une illusion, car elle doit faire au moins du 80 à l’heure !) telle une feuille double finement balancée par le vent assez fort.»
15 septembre 1993. À Namur, Jacques Dutronc vient donner un concert aux Fêtes de Wallonie. Pour la rédaction locale, Xavier Diskeuve est « désigné volontaire» pour aller interviewer le chanteur, réputé «l’homme le plus inaccessible de France». Les interviews ? Elles se font sur scène, en plein concert. Pour tenter de rencontrer Jacques Dutronc, Xavier Diskeuve et le photographe Philippe Berger planquent au Château de Namur. Arrive effectivement le chanteur… qui s’est en fait trompé d’hôtel. Et c’est à Xavier Diskeuve qu’il demande le chemin. Il explique le trajet et c’est même en suivant la petite R5 du journal que le chanteur arrive à bon port. Au bout du compte, le journaliste demande un bout d’interview. «OK, mais après le concert » Le chanteur tiendra sa parole… mais cela ne se passera pas tout à fait comme le pensait le journaliste.
Juin 2015. Plusieurs scènes du film “Les Visiteurs 3” sont tournées à Namur. Quand les journalistes de L’Avenir débarquent, à l’aube du premier jour de tournage, sur une place Saint-Aubain transformée en QG des Visiteurs, un sbire annonce la couleur : « Ils n’en ont rien à foutre de la presse belge ! » « Ils », ce sont les gens de Gaumont, maison de production française qui refuse que les acteurs soient photographiés. Pour un journal de proximité, il est inconcevable de ne pas immortaliser un tel événement. Alors, quand Christian Clavier, dans son costume traverse la place à pied, Florent Marot dégaine son appareil. L’assistant de l’acteur, qui l’escorte, hausse le ton et en vient aux menaces… physiques et verbales: « Si une photo a le malheur de se retrouver dans le canard, il y aura des représailles ». Le journal a pris le risque. Et même remis ça le week-end suivant.
Janvier 1972. Les pelleteuses s’activent, les camions sont pris dans un ballet incessant.Le quartier du Grognon vit ses dernières semaines. Le Grognon est sans conteste le dossier namurois qui a rempli le plus de pages de (Vers) L’Avenir depuis la guerre. Dès avant la Seconde Guerre, pour raison d’assainissement, plusieurs rangées de maisons ont été démolies. De 1951 à 1972, les démolitions se succèdent, îlot par îlot, encouragées par des subsides gouvernementaux : les rues de Grognon, Saint-Hilaire, des Moulins disparaissent tour à tour du paysage. Les plans d’aménagement se succèdent mais ne voient pas le jour. Ce n’est finalement qu’en 2014 qu’un projet définitif est arrêté: un parking souterrain, un rond-point côté Sambre, un Port numérique (qui changera de nom et cherche sa véritable affectation) côté Meuse, une passerelle vers Jambes. Cette fois, c’est l’unanimité. Les travaux débutent en 2017.
27 juin 1977. Dans la vallée de l’Eau d’Heure, le barrage de la Plate Taille se remplit. En quelques semaines, annonce Vers l’Avenir, la tour a surgi de terre, au milieu du mur qui retiendra l’eau du plus grand barrage de Belgique. Le barrage inférieur est déjà sous eau. la photo est prise à l’emplacement de l’ancienne gare de Falemprise. Le chantier gigantesque de construction des cinq barrages a commencé en 1972. Leur objectif : soutenir le débit d’étiage de la Sambre.
27 janvier 1971. Un avion F104G de la base de Beauvechain s’est écrasé à Chapois-Leignon. Le pilote, le capitaine aviateur Declerck, de Winksele, s’est posé, avec son parachute, à dix kilomètres de là, dans une pâture, à Heure-en-Famenne. Il y a été accueilli par une habitante, Mme Ottelet, qui lui propose une tasse de café réconfortante. C’est là que le journaliste Paul Bouchat le rencontre. « Je survolais un bois, que je croyais situé à hauteur de Ciergnon, à une altitude de 30.000 pieds, raconte-t-il, lorsque, par suite d’incidents mécaniques, je me rendis compte que l’avion allait s’écraser. J’actionnai alors mon siège éjectable. Avec quelques difficultés, le parachute s’ouvrit, mais le vent, qui soufflait violemment, me déporta, et je vis défiler, sous mes pieds, une immense région, avant d’atterrir près d’ici. »
27 octobre 1971 : inauguration du viaduc de Beez, enfin terminé. Après le couper de ruban par les ministres De Saeger (Travaux publics), Héger, Hanin et Namêche, les personnalités franchissent, à pied, le nouvel ouvrage d’art. Constitué de 29 caissons de 145 tonnes fabriqués par les Ateliers de construction de Jambes, il est le plus long de Belgique, avec ses 551 mètres de long, Un mois plus tôt, des essais de résistance ont été réalisés avec succès : 78 camions chargés ont été placés sur la partie centrale ; le tablier est descendu de 28 cm seulement.