«Je me suis souvent caché»

«Enlever ces étiquettes»

«Pour les gens, le SDF est considéré comme quelqu’un de sale, mal habillé, mais ce n’est pas ça, il y a beaucoup de choses qui doivent rentrer en compte.»

Thierry Sturbois ne connaît que trop bien ces étiquettes qui collent au dos des sans-abri. Il s’est déjà retrouvé deux fois à la rue. Aujourd’hui, il s’est à nouveau sorti du sans-abrisme. Le trentenaire (36 ans) vit dans un logement social qui lui coûte 365 euros par mois « charges comprises» et perçoit des indemnités de chômage qui s’élèvent à 950 euros.

«Je me suis souvent caché»

«Ici sur Charleroi ou les alentours, il y a beaucoup de marchands de sommeil qui, pour l’espace et pour ce que c’est, demandent excessivement cher,» estime Thierry, qui indique avoir été précisément victime de l’un d’eux lorsqu’il s’est retrouvé sans abri pour la première fois «en 2012».

«J’ai pu compter sur des proches, mais de nous-mêmes on essaie de s’en sortir, on aimerait bien le dire mais on a cette petite barrière… Des fois, on a peur d’aller vers les proches, leur expliquer notre situation, qu’on s’est retrouvé à la rue, qu’on doit faire la manche pour survivre. Je me suis souvent caché parce que je ne voulais pas qu’un membre de ma famille me voie dans cette situation. (…) Faire cette démarche, le premier pas, c’est le plus dur.»

« Il ne faut pas oublier les morts de la rue»

Autre difficulté aux yeux de Thierry Sturbois, se remettre sur les bons rails, se réinsérer, malgré le soutien d’associations telles que «Comme chez soi».

«Quand on est à la rue, on souhaite toujours avoir un toit, mais des fois, la rue nous appelle, que ce soit en bien ou en mal… La rue, il faut le voir pour y croire,» témoigne-t-il en la qualifiant de jungle.

Une «jungle» qui a déjà coûté la vie au moins à 24 personnes, rien qu’en 2017. « Il ne faut pas oublier les morts de la rue,» confie celui qui se verrait bien dans une fonction d’éducateur de rue, tentant de guider les sans-abri sur la difficile voie de la réinsertion.

59 jours pour retrouver un toit, challenge relevé pour Maurice

La voie de la réinsertion, Maurice Assez (52 ans) l’a prise. Il s’était fixé « deux mois » pour retrouver un toit, un challenge qu’il a réussi à relever après «59 jours», contre un loyer de « 500 euros ». Une charge très importante quand on dispose du revenu d’intégration social (850 euros) et qu’on doit encore payer les charges et se nourrir. «Comme je ne suis pas très dépensier, ça ne me fait rien. Le but maintenant, c’est de trouver un emploi. Ce n’est pas une solution, le CPAS.»

Jennifer: « C’est surtout le Rebond qui m’a nourrie »

Sous l’arbre à palabre, Jennifer Steenperghs (33 ans) dit se servir « des bêtises » comme de leçons de vie. « Parfois, je rêve d’être dans une bulle et d’avoir une vie normale… »

Comme Thierry, Jennifer s’est retrouvée sans abri deux fois. « La deuxième fois, j’ai été à la rue huit mois, » témoigne-t-elle. « Je suis restée à l’écart, j’ai dormi sous un pont… J’étais un peu seule mais ça valait mieux, car au moins, je n’étais pas dans la drogue, dans l’alcool. »

« C’est surtout le Rebond qui m’a nourrie, » indique Jennifer. « Si j’ai le sentiment de m’en être sortie? À moitié. »

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