Journaliste : Cristel Joiris

Images : Jacques Duchateau
Développeur: Joachim Krieger

En tournée depuis le début de l’année après la sortie de son album « Ce soir, on sort », Patrick Bruel a fait étape à Bruxelles du 14 au 16 mai pour trois concerts sold out. Nous avons rencontré le chanteur, dans les coulisses de Forest National, lors de l’un de ces grands rendez-vous avec le public belge.

Arrivé à Bruxelles mardi 14 mai en matinée, Patrick Bruel et les 75 personnes qui l’accompagnent sur cette tournée, ont posé leurs tonnes de matériel à Forest National pour trois jours.Sollicité par de très nombreux médias le jour de son anniversaire – qu’il ne se réjouissait pas du tout de fêter – l’artiste nous accueille, dans un climat nettement plus intimiste, le lendemain.

« Ouf, c’est derrière moi, on ne va plus me parler de mon âge pendant un an, se réjouit-il en rigolant. Il y a juste un journaliste qui l’a écrit dans un article hier, peste-t-il naïvement. « Ah là là, j’ai vraiment été con d’évoquer ma date de naissance dans une chanson (NDLR : Flash Back) », poursuit-il en nous ouvrant les portes de sa loge.

Lumière tamisée, deux canapés, un large miroir, une salle de bains… La pièce de 15 m2, décorée sobrement, est son havre de paix quand il a besoin de s’isoler. « Je me retrouve parfois seul mais on doit aussi répondre à pas mal de sollicitations avant et après le spectacle, ça fait partie de notre métier. »

Le décompte final avant le grand saut

Son attachée de presse frappe justement à sa porte. Il est 19 h. À une heure de son entrée en scène, il a rendez-vous avec deux admiratrices Jocelyne et Françoise. Elles ont acheté son disque d’or, en décembre, aux enchères de Viva for Life. « Elles viennent lui faire signer et lui remettre quelques cadeaux », précise Katia Mahieu, fidèle responsable de sa communication en Belgique depuis plus de 10 ans. Un rien nerveuses en attendant le rendez-vous de leur vie, les deux femmes sont gentiment accueillies par le chanteur pendant plus de dix minutes. La séance de photos et d’autographes se fait en toute décontraction.

« Je suis à vous dans 2 minutes », s’excuse alors Patrick, au téléphone, en se dirigeant vers un technicien venu peaufiner quelques détails pour le spectacle.19 h 20, retour en loge où il nous invite à prendre place sur le canapé décoré de son chiffre fétiche « 14 ». À 30 minutes de son entrée en scène, l’interview peut commencer. « Bruxelles est toujours une date que mes musiciens et moi attendons avec beaucoup d’impatience. On sait qu’il va s’y passer quelque chose de fort, à chaque fois. »

À l’image de ce qu’il s’est passé au moment de l’ouverture de la billetterie, en juin, où en quelques jours, les places pour ce « Tour 2019 » se sont arrachées comme des petits pains. « De manière générale, outre la Belgique, l’album n’était même pas encore sorti que les gens répondaient présents, se réjouit-il. C’est incroyable ce qui se passe sur cette tournée. »

Au total, Patrick Bruel a prévu de jouer 6 dates à Forest sur cette tournée 2019, ce qui en fait la ville la plus visitée avec Paris.

Trente ans après la Bruelmania, le phénomène n’a donc pas pris une ride mais se conjugue sous une autre forme. L’hystérie des années 90 a fait place à plus de sagesse, à une qualité d’écoute et un vrai respect de l’artiste.« Les fans qui venaient me voir il y a trente ans sont toujours les mêmes mais ont mûri. Elles emmènent leur mari et leurs enfants qui ne semblent pas être déçus. Ce renouvellement générationnel est sublime à voir. Les salles sont remplies de personnes âgées de 15 à 30 ans… je n’avais plus vu ça depuis longtemps. »

Jamais rassasié

Quand il évoque ce public toujours plus fidèle dans les salles de concert, se passant le témoin sans jamais s’essouffler, le chanteur regarde dans le vide, incrédule. L’émerveillement est intact. « Je vis un rêve éveillé », glisse-t-il, ému.

Car s’il donne l’apparence d’un homme sûr de lui, Patrick Bruel est un artiste sans cesse en quête de reconnaissance, dans le doute à chacune de ses audaces. Malgré la réussite et le succès. « Rien n’est jamais acquis. Si on fait un mauvais spectacle, on le paye cash à la prochaine tournée car les gens ne reviennent plus. Pareil avec un disque. »

Alors, à la manière d’un sportif de haut niveau jamais rassasié, il remet son titre en jeu au fil des années avec ce besoin impulsif de se lancer des nouveaux défis, toujours plus risqués, comme pour prouver autour de lui que son succès est légitime.

Quinze minutes d’interview plus tard, les applaudissements de plus en plus vrombissants d’une salle pleine à craquer nous rappellent qu’il est bientôt l’heure. Encore quelques photos et Patrick prend congé de nous. « Le temps de me mettre dans ma bulle », sourit-il.

À 20 h 14, il est prêt. Il sort de sa loge, l’air déterminé, les yeux rivés vers l’horizon, les traits de son visage se sont durcis… comme un boxeur prêt au combat. Le bruit de la foule impatiente s’intensifie. En backstage, chaque technicien est à son poste. Au pied des escaliers qui le mènent à la gigantesque scène, l’artiste respire profondément avant de porter le micro à sa bouche…

Au moment de sortir de scène, deux membres de son équipe s’agitent au bas des escaliers pour lui passer un essuie autour du cou. Son large sourire en dit long, l’artiste est satisfait, heureux du show qu’il vient de livrer. Et de la dose d’amour qu’il vient de recevoir. « De l’amour comme s’il en pleuvait » chante son copain Cabrel…

Un immense paquebot dont il est le capitaine

Plus de 600 000 spectateurs sont déjà venus applaudir Patrick Bruel sur cette tournée entamée le 12 février à Epernay. Le chanteur a vu large. La tournée sera longue de… 103 dates avec deux concerts apothéose à la Défense Arena, à Paris, les 6 et 7 décembre. « Et j’en ai rajouté une à Bruxelles le 27 novembre  »

Un marathon qu’il gère avec une équipe fidèle depuis plus de 25 ans. « Ils connaissent les codes, ils savent comment ça fonctionne et c’est ce qui explique sans doute cette longévité… »Chaque soir durant cette tournée, soutenu par une scénographie à couper le souffle, le chanteur offre plus de 2 h 45 de spectacle et beaucoup de sueur à un public en délire.

« C’est sûr que cette tournée ne me ménage pas, sourit-il mais je mets tout en place pour prendre soin de moi au maximum. Je prends des semaines de repos, de remise en forme. J’aménage également mon temps pour pouvoir voir mes enfants entre Paris et Los Angeles. »

Une journée type en tournée

Nous avons demandé à Patrick Bruel quelle était sa journée type lorsqu’il était en tournée.

« Le matin, soit je me lève assez tôt pour aller faire un peu de sport, soit mon corps me dit non et je me repose plus longtemps. À midi, nous allons en règle générale manger un bout avec les musiciens, les amis, dans un endroit sympa de la ville dans laquelle nous sommes. À 16 h 00, place au « soundcheck ». Nous effectuons des balances dans chaque salle. Ensuite, nous mangeons vers 18 h 30 avant de consacrer une heure à la presse, aux « meet and greet », etc. Après le spectacle, il y a encore des rencontres avec des invités, des fans… parfois il y a une « after party » où on s’amuse un peu mais je veille à rester assez raisonnable sinon je le paye cash le lendemain.»