Depuis que le confinement a été imposé à la population, la vie dans notre pays, comme ailleurs, est au ralenti. De nombreuses entreprises sont à l’arrêt, alors que d’autres fonctionnent presque normalement.

Pour les parcs animaliers, la vie continue. Les animaux ont besoin de soins et de nourriture tout au long de l’année, confinement ou pas.

Nous avons visité quatre parcs animaliers de Wallonie et y avons recueilli des témoignages. Là où des femmes et des hommes continuent inlassablement leurs tâches essentielles, dans l’espoir de jours meilleurs.

VIDÉOS

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Comment fonctionne un parc animalier en période de confinement ?

Un parc animalier, ce n’est pas une entreprise comme une autre. Il faut être présent 7 jours sur 7 pour assurer les soins et le nourrissage des animaux. Pas question de prendre congé ou de faire relâche. Les équipes sont au taquet.

Pendant le confinement, c’est un peu plus compliqué. Certains parcs sont bien habitués à fermer plusieurs semaines ou mois par an, pendant l’hiver. Mais le printemps est toujours synonyme de retour aux affaires. Et surtout, de rentrées financières.

Le parc Forestia, à Theux, a cette particularité d’être ouvert toute l’année. C’est un des seuls de Wallonie dans ce cas. Mais depuis mi-mars, les équipes sont réduites. Et les activités aussi.

Ici, la nature prend tous ses droits. Et cela s’entend. Les chants des oiseaux, les grognements des sangliers. Et puis il y a ces trois nouveaux oursons, tout droit venus des États-Unis cet hiver. Complètement indifférents à ce qui se passe autour d’eux, ils continuent inlassablement de jouer, de grimper aux arbres. Insouciants.

Philippe Lafontaine est le directeur du parc. « On souffre beaucoup du confinement. Nous avons un réel manque à gagner. Heureusement, l’entreprise est saine et a les reins solides. » Mais les charges restent importantes. Si les équipes administratives ont été ramenées au minimum et que les horecas et activités annexes (le parc accrobranche) sont fermés, l’équipe des soigneurs continue le travail normalement.

« Pour les animaux la vie continue et ils ne manquent de rien, » poursuit Philippe Lafontaine qui espère beaucoup de la reprise, lorsqu’elle interviendra. « Les gens n’osent pas planifier leurs vacances d’été, on espère donc qu’ils profiteront de la nature en Belgique. Parce qu’ils n’auront probablement pas l’occasion d’aller bien loin. »

Un espoir entretenu par les nombreux messages de sympathie reçus depuis plusieurs jours. « Ça nous fait chaud au coeur. »

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Les soigneurs de Han-sur-Lesse

Au Domaine des Grottes de Han-sur-Lesse aussi, la vie continue pour les centaines d’animaux du parc. Nourriture, soins, entretien des enclos, le quotidien de l’équipe des soigneurs est immuable.

En cette période de confinement, il a fallu adapter le travail. Sauf dans certains cas.

Anthony Kohler est responsable adjoint du parc animalier : « En ce moment, c’est un peu plus compliqué que d’habitude. On a dû mettre au chômage une partie du personnel. Tout le travail non essentiel est arrêté. Reste l’essentiel pour nous : le bien-être des animaux. »

L’équipe habituelle des soigneurs a été divisée en deux et les horaires adaptés. Chacun a un jour de congé, suivi de six jours de prestation puis de nouveau un jour de congé.

À chaque roulement, tous les 6 jours, tout le matériel est entièrement désinfecté : voitures, outils, plan de travail, ustensiles de cuisine, cadenas, poignées de portes, …

Anthony Kohler : « L’idée, c’est que les deux équipes ne se croisent pas, pour éviter de mettre tout le monde sur la touche en cas de contamination. On est seul dans les véhicules, on porte des gants, désormais on a un masque, on se nettoie les mains régulièrement. »

Mais pour certaines tâches, ce n’est pas si simple. « Même si on fait en sorte de toujours être seul, il y a certaines règles de sécurité qui nous obligent à travailler en duo : pour rentrer dans l’enclos des loups et assurer leur nourrissage, on doit être à deux. On applique la distanciation dès que l’on peut. Mais si on doit porter une charge à deux, c’est plus difficile. Quand on doit se parler, on le fait sans se regarder, pour éviter les projections de gouttelettes. On sait qu’il y a une certaine part de risques mais on ne peut pas aller à l’encontre des règles de sécurité inhérentes à la particularité de notre métier. »

Dans leur grand enclos, les loups blancs rôdent. Le loup est un animal prudent. Il ne se jette par sur les morceaux de poulet déposés là par Anthony et sa collègue Dominique. Il s’approche, repart, revient pour finalement emporter un morceau de sa pitance et le manger dans son coin. À l’écart, les deux soigneurs observent leur comportement. Fascinés par la beauté de ces animaux sauvages.

Le Domaine des Grottes de Han peut supporter cette situation, pour autant qu’elle ne s’éternise pas. Une partie du personnel a été mise au chômage économique mais il n’est pas envisagé de licencier qui que ce soit. Les contrats des saisonniers ont été postposés. L’emploi n’est pas menacé. Pour les mêmes raisons qu’à Forestia, « on a confiance dans la reprise ».

La reprise, justement. Un groupe de travail planche déjà sur l’organisation qu’il faudra mettre en place. « Parce que l’on doit pouvoir proposer aux visiteurs un système qui soit le plus sécurisé possible », conclut Anthony Kohler.

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Les otaries du Mont Mosan

Ferdinand, Baba, Neptune, Lola et la petite dernière, Florine. Comme les loups de Han-sur-Lesse, les otaries du Mont Mosan, à Huy, ont droit à une attention toute particulière.

Johan Van Damme est soigneur animalier au Mont Mosan. Chaque jour, il fait le tour du parc, nourrit les animaux, vérifie l’état des enclos, assure l’entretien des bassins, vérifie la qualité de l’eau. Mais les animaux aquatiques, otaries, phoques, manchots, requièrent une attention particulière. Surtout les otaries.

« Notre parc fonctionne pratiquement comme d’habitude mais en équipe réduite. Et sans visiteurs… Ici on travaille avec 3 soigneurs. Les entraînements des otaries continuent tous les jours. Bien qu’elles puissent s’en passer, elles ont une mémoire de 5 ans. Mais c’est l’occasion de peaufiner certains exercices, certains tours ».

Johan a bien entendu parler de cette histoire d’un tigre qui aurait été infecté par le virus mais cela ne le tracasse pas. Puis le vétérinaire vient une fois par mois pour contrôler la santé des animaux.

Le Mont Mosan, c’est 80 000 visiteurs par an. Les grosses journées de Pâques, c’est entre 1 200 et 1 500 personnes par jour. Avec un confinement qui a débuté juste avant Pâques, les pertes sont déjà importantes. « Mais on s’adapte, on en profite pour continuer les travaux, terminer les nouveaux gradins. L’emploi n’est pas menacé, l’équipe reste normale en dehors des étudiants mais ils seront repris dès l’ouverture du parc. »
Dans leur bassin, Lola, Ferdinand et les autres continuent leurs pirouettes dans l’eau. Pour les otaries du Mont Mosan, la vie est un grand jeu. Pas de temps pour la morosité, même en plein confinement.

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Le Monde Sauvage d’Aywaille prépare le déconfinement

Au Monde Sauvage d’Aywaille, au milieu des rhinocéros et des zèbres, on pense déjà au futur. Et à la réouverture. Cette période de confinement met à mal l’entreprise familiale.

Ronald Renson est gestionnaire de la collection animalière. « On ne vit pas vraiment au ralenti parce que les soins aux animaux restent les mêmes, hiver comme été. On a une période de fermeture et justement, on devait rouvrir le lendemain de l’annonce du confinement. Mais on reste avec une équipe complète de 32 soigneurs animaliers. Ça devient compliqué. On n’a pas de rentrées financières. »

À Pâques, le Monde Sauvage reçoit jusqu’à 2000 visiteurs par jour. Là, il n’y a personne. Et faute de rentrées financières, c’est le prochain hiver qui sera difficile.

« On pense déjà à la constitution de notre réserve financière pour l’hiver 2020-2021. Il faut pouvoir payer les charges et les salaires pendant cette période qui dure 4 mois. On espère que l’on pourra recommencer une vie normale le plus rapidement possible. On anticipe pour une
ouverture partielle, puis au moins pouvoir fonctionner de manière pleine et complète aux vacances d’été. »

Pour l’emploi, Ronald Renson ne sait pas de quoi demain sera fait mais l’entreprise compte bien garder tous ses soigneurs.

Niels Schouteden est chef vétérinaire au Monde Sauvage d’Aywaille. Il travaille sur l’organisation du parc pour le déconfinement. Une véritable stratégie sanitaire en vue de la réouverture des activités. « Le lockdown ne va pas être arrêté d’un coup. On a prévu une organisation pour certaines parties du parc pour éviter que les gens se regroupent. Il faut savoir que le Monde Sauvage d’Aywaille est le seul safari parc de Belgique. Pour ce type de visite, les gens restent dans leur voiture. Ce qui permet déjà de gérer les flux de visiteurs. La difficulté c’est en fait principalement dans les lieux de rassemblement, aux files, dans les horecas. »

Niels a réalisé une étude sur base de photos aériennes du parc. Le but est de gérer les déplacements des visiteurs de façon à éviter les regroupements. De cette manière, le Monde sauvage pourrait accueillir entre 800 et 1 000 personnes de manière sécurisée.

Ronald Renson conclut : « Nous restons une petite entreprise familiale. Pour ce qui est des projets, on travaille à petite échelle. Nos nouveautés 2020 ont été mises en place fin 2019. Mais certaines espèces qui devaient arriver au parc pour le printemps de cette année ont été postposées. Tout cela va devoir attendre. »

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Fédérer

D’un parc à l’autre, l’approche diffère quelque peu. Mais tous doivent continuer le travail, les soins aux animaux. Et chacun porte un regard tantôt serein, tantôt inquiet, vers les prochaines semaines.

S’il y a bien une fédération européenne des parcs et zoos, il n’en est rien au niveau belge. Chacun joue un peu sa carte perso. Et les grands parcs que sont Pairi Daisa ou Planckendael ne tendent pas nécessairement la main vers les plus petits. Ce manque de cohésion ne permet dès lors pas de porter un message commun auprès du monde politique pour envisager et organiser la reprise d’un secteur d’activité très particulier. Peut-être cette situation de crise amènera-t-elle les parcs animaliers à constituer une fédération représentative.

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