Quand les Cavalier
entrent dans la danse

De la danse country à la danse victorienne en passant par les reconstitutions historiques, la culture américaine se vit intensément, chez les Cavalier. “Mais avec modération”.
Rencontre.

Santiags et Stetson

“Alors, je propose qu'on fasse quatre lignes pour la prochaine chorégraphie. Vous connaissez bien le morceau et vous savez toutes ce que vous devez faire. Rien de très compliqué. Allez, c'est parti, je lance la musique !” A 60 ans, Arlette Cavalier maitrîse son sujet. Santiags aux pieds et Stetson sur la tête, la fondatrice du “Eagle Star Country Dancers” et ses élèves enchaînent les pas sur l'air de “Chattahoochee”, un standard de la country.

"Nous avons lancé ce club de danse en 2008, se souvient la Perwézienne. Au départ, nous n'étions que quelques-uns mais le groupe a vite pris de l'ampleur. Aujourd'hui, rien que pour les cours de country, nous dépassons les 40 membres." Que des femmes, pour la majorité, qui se déplacent de démonstrations en concerts pour faire connaître leur hobby. “C'est une activité que j'ai découverte au début des années 2000, poursuit Arlette, la présidente et monitrice du club brabançon. Que ce soit par ses sonorités, ses accessoires ou encore l'image du cowboy américain qu'elle renvoie, la country m'a toujours attiré. J'ai juste attendu que mes enfants soient un peu plus grands pour m'y adonner plus longuement. Et depuis lors, tout s'est enchaîné naturellement.”

La passion grandissant, l'ancienne employée de banque enchaîne les cours à Bruxelles et Grez-Doiceau avant de créer son propre club dans sa ville d'adoption. Un club qui, depuis 2015, propose également des cours de danse victorienne grâce à... son mari, Jean-Claude.

Jean-Claude, le général sudiste

En costume d'époque - “Aujourd'hui, je suis habillé en général de l'armée sudiste” - dans un coin de leur salle de répétition, Jean-Claude Cavalier attend les toutes dernières notes de “Cotton Eye Joe” pour lancer son cours.

“Pour ma part, je préfère l'aspect historique de la danse victorienne aux chorégraphies de la danse country, explique-t-il. C'est aussi pour cette raison que je participe à des reconstitutions où je présente un télégraphe d'époque que je possède. En fait, en faisant tout cela, j'ai l'impression de revivre en partie l'époque du film “Autant en emporte le vent”. Mais qu'on ne s'y trompe pas, je fais bien la distinction entre mes passions et la vie de tous les jours... Vous ne me verrez jamais faire mes courses habillé en sudiste par exemple ! Mais sans doute qu'il y a une partie de moi qui n'arrive pas à se défaire du cowboy que je m'amusais à jouer quand j'étais gamin.”

De quoi expliquer, en partie, pourquoi les Cavalier sont déjà partis à quatre reprises visiter l'Ouest américain.

“Là-bas, on se croyait vraiment dans un Lucky Luke

Impatient de parcourir les grands espaces américains qui les ont toujours fait rêver, le couple perwézien s'est rendu pour la première fois aux Etats-Unis en 1999.

“Ce qui nous a surtout marqués à l'époque, c'est que tout est plus grand là-bas, racontent Arlette et Jean-Claude. C'est vraiment un pays d'extrêmes. Incomparable avec ce qu'on connaît en Europe. Prenez le Grand Canyon par exemple... Même en ne découvrant qu'une infime partie des 400 km de long de cette faille, on hallucine tellement c'est gigantesque. On est resté sans voix. Et en même temps, c'est tellement beau aussi ! Dans ces moments-là, il y a plein d'émotions qui vous traversent. Ce sont des sensations très spéciales auxquelles on ne s'habitue jamais.”

Depuis le début des années 2000 jusqu'en 2010, mari et femme vont enchaîner les voyages outre-Atlantique. Aux grandes villes de béton, ils ont toujours préféré la beauté des parcs nationaux de Yosemite ou Yellowstone. Mais pas que...

“On a aussi visité pas mal de villes historiques, se souvient Jean-Claude Cavalier. C'est le cas de Tombstone, en Arizona, où s'est déroulée la fameuse fusillade qu'on voit dans “O.K. Corral”. Ou encore de Promontory Point où s'est constitué le premier chemin de fer transcontinental des Etats-Unis. A chaque fois, c'est comme si on faisait partie d'une planche de Lucky Luke. Ca reste de supers souvenirs. Et puis, les Américains sont tellement gentils, toujours accueillants et prévenants.”

Véritablement sous le charme de l'Ouest sauvage, les Cavalier n'en restent pas pour autant très critiques à l'égard de la société américaine. “Est-ce qu'on serait prêt à y emménager ? Non, assure Arlette. La beauté des paysages ne fait pas tout !” Et le couple d'évoquer quelques situations quasiment inimaginables en Europe. “Comme ce jour où, à 10h du soir, nous avions croisé un monsieur, visiblement très malade, qui était obligé de travailler sur le parking d'un supermarché du Wyoming alors qu'il avançait avec une bonbonne d'oxygène.” Ou encore cette Syrienne qui vendait des pâtisseries près de Hollywood “et qui n'était pas habituée à voir des clients lui parler autrement que pour lui commander à manger”.

Trump va isoler les Américains”

“Quand je dis que c'est un pays d'extrêmes, je pense aussi que c'est un pays de contrastes, estime Jean-Claude Cavalier. On sent qu'il y a une fracture dans cette société américaine. Que tout le monde n'est pas logé à la même enseigne, que ce soit d'un point de vue médical ou d'un point de vue culturel. Pour ma part, je ne suis pas certain qu'on aurait été aussi bien accueilli si nous n'avions pas été blancs. Traversez le centre de la Californie et vous vous rendrez vite compte que les communautés ne se mélangent pas, et que les Mexicains donnent l'impression d'être mis de côté. D'ailleurs, ce n'est pas compliqué, on entendait des gens les appeller les “greasy” (les “huileux”, en français) à cause de leur peau. C'est quand même bien le signe que l'intégration n'y est pas vraiment réussie. Et je ne suis pas certain que ça va aller en s'améliorant, surtout avec l'arrivée de Trump au pouvoir.”

Car, s'ils évitaient de parler politique avec les Américains qu'ils rencontraient lors de leurs voyages, Arlette et Jean-Claude ont leur propre opinion sur le nouveau président américain. “Il ne représente pas les Etats-Unis qu'on a parcourus. Il pense pouvoir gérer le pays comme il gère ses affaires, en virant tous ceux qui ne vont pas dans son sens. Peut-être qu'il fera quelques bonnes choses au niveau national mais il fera plus de mal que de bien aux Américains car il va les isoler du reste du monde.” De la réforme de l'Obamacare au renoncement des accords de Paris, le couple perwézien se retrouve de moins en moins dans cette nouvelle Amérique. “C'est simple, les Etats-Unis de Trump ne nous font plus rêver !”

Pas de quoi les empècher de danser pour autant...

Quand les Cavalier
entrent dans la danse

De la danse country à la danse victorienne en passant par les reconstitutions historiques, la culture américaine se vit intensément, chez les Cavalier. “Mais avec modération”.
Rencontre.

Santiags et Stetson

“Alors, je propose qu'on fasse quatre lignes pour la prochaine chorégraphie. Vous connaissez bien le morceau et vous savez toutes ce que vous devez faire. Rien de très compliqué. Allez, c'est parti, je lance la musique !” A 60 ans, Arlette Cavalier maitrîse son sujet. Santiags aux pieds et Stetson sur la tête, la fondatrice du “Eagle Star Country Dancers” et ses élèves enchaînent les pas sur l'air de “Chattahoochee”, un standard de la country.

"Nous avons lancé ce club de danse en 2008, se souvient la Perwézienne. Au départ, nous n'étions que quelques-uns mais le groupe a vite pris de l'ampleur. Aujourd'hui, rien que pour les cours de country, nous dépassons les 40 membres." Que des femmes, pour la majorité, qui se déplacent de démonstrations en concerts pour faire connaître leur hobby. “C'est une activité que j'ai découverte au début des années 2000, poursuit Arlette, la présidente et monitrice du club brabançon. Que ce soit par ses sonorités, ses accessoires ou encore l'image du cowboy américain qu'elle renvoie, la country m'a toujours attiré. J'ai juste attendu que mes enfants soient un peu plus grands pour m'y adonner plus longuement. Et depuis lors, tout s'est enchaîné naturellement.”

La passion grandissant, l'ancienne employée de banque enchaîne les cours à Bruxelles et Grez-Doiceau avant de créer son propre club dans sa ville d'adoption. Un club qui, depuis 2015, propose également des cours de danse victorienne grâce à... son mari, Jean-Claude.

Jean-Claude, le général sudiste

En costume d'époque - “Aujourd'hui, je suis habillé en général de l'armée sudiste” - dans un coin de leur salle de répétition, Jean-Claude Cavalier attend les toutes dernières notes de “Cotton Eye Joe” pour lancer son cours.

“Pour ma part, je préfère l'aspect historique de la danse victorienne aux chorégraphies de la danse country, explique-t-il. C'est aussi pour cette raison que je participe à des reconstitutions où je présente un télégraphe d'époque que je possède. En fait, en faisant tout cela, j'ai l'impression de revivre en partie l'époque du film “Autant en emporte le vent”. Mais qu'on ne s'y trompe pas, je fais bien la distinction entre mes passions et la vie de tous les jours... Vous ne me verrez jamais faire mes courses habillé en sudiste par exemple ! Mais sans doute qu'il y a une partie de moi qui n'arrive pas à se défaire du cowboy que je m'amusais à jouer quand j'étais gamin.”

De quoi expliquer, en partie, pourquoi les Cavalier sont déjà partis à quatre reprises visiter l'Ouest américain.

“Là-bas, on se croyait vraiment dans un Lucky Luke

Impatient de parcourir les grands espaces américains qui les ont toujours fait rêver, le couple perwézien s'est rendu pour la première fois aux Etats-Unis en 1999.

“Ce qui nous a surtout marqués à l'époque, c'est que tout est plus grand là-bas, racontent Arlette et Jean-Claude. C'est vraiment un pays d'extrêmes. Incomparable avec ce qu'on connaît en Europe. Prenez le Grand Canyon par exemple... Même en ne découvrant qu'une infime partie des 400 km de long de cette faille, on hallucine tellement c'est gigantesque. On est resté sans voix. Et en même temps, c'est tellement beau aussi ! Dans ces moments-là, il y a plein d'émotions qui vous traversent. Ce sont des sensations très spéciales auxquelles on ne s'habitue jamais.”

Depuis le début des années 2000 jusqu'en 2010, mari et femme vont enchaîner les voyages outre-Atlantique. Aux grandes villes de béton, ils ont toujours préféré la beauté des parcs nationaux de Yosemite ou Yellowstone. Mais pas que...

“On a aussi visité pas mal de villes historiques, se souvient Jean-Claude Cavalier. C'est le cas de Tombstone, en Arizona, où s'est déroulée la fameuse fusillade qu'on voit dans “O.K. Corral”. Ou encore de Promontory Point où s'est constitué le premier chemin de fer transcontinental des Etats-Unis. A chaque fois, c'est comme si on faisait partie d'une planche de Lucky Luke. Ca reste de supers souvenirs. Et puis, les Américains sont tellement gentils, toujours accueillants et prévenants.”

Véritablement sous le charme de l'Ouest sauvage, les Cavalier n'en restent pas pour autant très critiques à l'égard de la société américaine. “Est-ce qu'on serait prêt à y emménager ? Non, assure Arlette. La beauté des paysages ne fait pas tout !” Et le couple d'évoquer quelques situations quasiment inimaginables en Europe. “Comme ce jour où, à 10h du soir, nous avions croisé un monsieur, visiblement très malade, qui était obligé de travailler sur le parking d'un supermarché du Wyoming alors qu'il avançait avec une bonbonne d'oxygène.” Ou encore cette Syrienne qui vendait des pâtisseries près de Hollywood “et qui n'était pas habituée à voir des clients lui parler autrement que pour lui commander à manger”.

Trump va isoler les Américains”

“Quand je dis que c'est un pays d'extrêmes, je pense aussi que c'est un pays de contrastes, estime Jean-Claude Cavalier. On sent qu'il y a une fracture dans cette société américaine. Que tout le monde n'est pas logé à la même enseigne, que ce soit d'un point de vue médical ou d'un point de vue culturel. Pour ma part, je ne suis pas certain qu'on aurait été aussi bien accueilli si nous n'avions pas été blancs. Traversez le centre de la Californie et vous vous rendrez vite compte que les communautés ne se mélangent pas, et que les Mexicains donnent l'impression d'être mis de côté. D'ailleurs, ce n'est pas compliqué, on entendait des gens les appeller les “greasy” (les “huileux”, en français) à cause de leur peau. C'est quand même bien le signe que l'intégration n'y est pas vraiment réussie. Et je ne suis pas certain que ça va aller en s'améliorant, surtout avec l'arrivée de Trump au pouvoir.”

Car, s'ils évitaient de parler politique avec les Américains qu'ils rencontraient lors de leurs voyages, Arlette et Jean-Claude ont leur propre opinion sur le nouveau président américain. “Il ne représente pas les Etats-Unis qu'on a parcourus. Il pense pouvoir gérer le pays comme il gère ses affaires, en virant tous ceux qui ne vont pas dans son sens. Peut-être qu'il fera quelques bonnes choses au niveau national mais il fera plus de mal que de bien aux Américains car il va les isoler du reste du monde.” De la réforme de l'Obamacare au renoncement des accords de Paris, le couple perwézien se retrouve de moins en moins dans cette nouvelle Amérique. “C'est simple, les Etats-Unis de Trump ne nous font plus rêver !”

Pas de quoi les empècher de danser pour autant...


Chapitre II

Crédits

Un webdocumentaire réalisé par

Journaliste : Alan Marchal

Photographe : Alan Marchal

Webmaster : Kevin Rolin

Infographiste : Geoffrey Guillaume

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A l'occasion de la Fête nationale américaine, L'Avenir est parti à la rencontre de ces Wallons qui se passionnent pour les Etats-Unis et leur culture. De la danse country au catch en passant par les "muscle cars", le pays de l'Oncle Sam fascine. Mais qu'est-ce qui pousse réellement ces Belges à s'émerveiller pour l'Amérique ? Et est-ce que l'arrivée au pouvoir de Donald Trump à modifier leur rapport à la culture U.S. ? Début de réponse en cinq portraits.

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